Dans bien des entreprises familiales, on considère que le caractère familial de l’entreprise suppose qu’elle soit dirigée par un ou plusieurs membres de la famille. Dans d’autres, on trouve un principe de « préférence » pour un familial lors du recrutement des salariés (à « compétences égales »). Dans quelques cas, plus rares en France, les RH familiales considèrent que cette position de salarié, pour un membre de la famille, ne peut être que temporaire, vue seulement comme une étape souhaitable dans le processus requis pour devenir un associé, voire un administrateur, éclairé.
Pourquoi la famille souhaite-t-elle avoir des familiaux salariés dans l’entreprise, ou ne pas en avoir ? Quel processus de ressources humaines familiales mettre en œuvre en fonction de cet objectif ?
Dans la majorité des cas, cette question est négligée et on se la pose rarement collectivement au sein de l’actionnariat. Or elle est très importante pour la dynamique familiale et pour la performance de l’entreprise. Elle devient rapidement problématique ce qui en fait un risque important pour le socle actionnarial. Voici quelques clés de lecture autour de cette notion des RH Familiales, pour faire de cet aspect un vecteur d’opportunités et pas un problème à gérer.
RH familiales : Quelle place pour les membres familiaux dans l’entreprise ?
D’abord quand faut-il se poser cette question ? L’intérêt de lancer une telle réflexion dans les RH familiales dépendra du niveau de maturité de chaque famille mais elle dépendra particulièrement de « l’âge » de la famille. Par âge, il est question de génération. Lance-t-on cette réflexion pour le 1er passage de témoin (génération 1 à 2) ou cette réflexion intervient-elle pour éviter des frottements entre cousins de 3ème génération (de différentes branches par exemple) ? Chaque situation est spécifique, néanmoins nous constatons que cette question apparaît plutôt à l’arrivée de la 3ème génération.
Aucune famille ne répondra de la même manière à la question de la place des familiaux dans l’entreprise tant cela dépendra de son histoire (relation entre ses membres, ses branches…), de ses valeurs (entrepreneuriales, mérite, équité…) et de son expérience passée. En France les familles considèrent souvent qu’avoir des familiaux opérationnels est important.
Ensuite l’actionnaire opérationnel occupe, en connaissance de cause ou bien malgré lui, une position bien spécifique qu’il convient de cadrer et d’accompagner au mieux par le biais de RH familiales. En effet il est parfois :
- Managé avec « des pincettes » par sa hiérarchie,
- Considéré comme un « initié » par ses collègues,
- Vu comme un privilégié par certains familiaux,
- Le cas échéant, associé à la « non-performance » aux yeux de tous,
- Il a fait le choix de « mettre tous ses œufs dans le même panier ».
Dans ce contexte, il ne semble pas raisonnable de lancer un familial vers l’opérationnel sans préparation ni accompagnement. Les risques sont nombreux, en particulier : aller trop vite et « se griller » ; ou donner le sentiment du « droit au fauteuil ».
RH familiales : Quelles questions poser afin d’organiser la présence des familiaux dans l’entreprise ?
Voici des éléments pour les RH familiales à interroger pour se préparer :
- Quels postes souhaite-t-on ouvrir aux membres de la famille ? Pourquoi ?
- Quel processus suivre pour l’accès à l’entreprise d’un membre de la famille ?
- Un comportement spécifique est-il demandé par la famille pour l’opérationnel familial ?
- Peut-on « faire carrière dans l’entreprise » ?
- Quelles possibilités offertes aux conjoints d’aujourd’hui ? et aux conjoints de demain (ceux de la nouvelle génération) ?
- Quel est le suivi de la performance pour les membres de la famille ? voir même : quelle rémunération pour les membres de la famille ?
- Comment se sépare-t-on d’un salarié familial si souhaité par lui ou par l’entreprise ?
Une fois ces questions posées, on observe qu’un processus simple doit être dessiné.
RH familiales : Quel processus spécifique faut-il mettre en œuvre pour les familiaux dans l’entreprise ?
Chaque collectif d’actionnaires définira le processus spécifique qui lui conviendra le mieux. Il est néanmoins clé de commencer en désignant un(e) responsable : le « référent RH familiales », que ce soit une personne ou un petit comité. Ce référent RH familiales est le premier interlocuteur des sujets RH concernant les familiaux dans l’entreprise. Il aide à centraliser les informations, à faire vivre le processus, à conseiller les familiaux opérationnels, à entretenir une logique de vivier lorsque cela est possible et il est dans un rapport très simple et fluide avec la direction de l’entreprise.
Cas 1 – Pour l’actionnariat d’un grand groupe du secteur agro-alimentaire, ce référent est le DRH du groupe en charge notamment d’assister et d’accompagner les membres de la famille à la recherche de conseils sur leurs choix professionnels, au sein ou en dehors du groupe familial. Il est aussi en charge d’identifier les talents dans un groupe qui souhaite faire venir des familiaux.
Cas 2 – Dans cet autre exemple, la famille à la tête d’un holding diversifié a souhaité que ce processus soit piloté en toute indépendance par un cabinet RH, extérieur aux activités et extérieur à la famille.
Le référent RH familiales interviendra donc à tous les moments du processus défini. Voici quelques exemples :
- Avant le recrutement du familial : identification des souhaits, évaluation, critères pour recruter un familial, schéma de rémunération,
- A l’entrée dans l’entreprise : fait le lien entre une candidature / un souhait d’un familial et un besoin exprimé par la société
- Pendant son temps dans l’entreprise: contribue à l’évaluation / Formation et suivi de parcours / Éventuels risques de conflits d’intérêt à éviter / l’articulation entre statut du familial associé-administrateur et statut du non-administrateur
- A la sortie de l’entreprise: critères et processus de sortie définis (et donc de « retour en arrière ») et schéma de communication associé.
Conclusion
Le recrutement d’un familial est donc une prise de risque réciproque pour le familial concerné, la famille et l’entreprise, risque qu’il convient de prévenir le plus possible avec un processus explicite. C’est un point clé à anticiper par les RH familiales au moment de l’arrivée d’une nouvelle génération en « âge professionnel », sous peine de faire peser un risque sur l’harmonie familiale et parfois sur la performance de l’entreprise.