La Responsabilité Sociétale de l’Actionnaires (RSA) : pierre angulaire de l’actionnariat familial ?

Illustration - Responsabilité sociétale des actionnaires

Les entreprises familiales, qui entrecroisent liens familiaux et économiques, avec un ancrage régional historiquement fort, assument une responsabilité sur leur environnement direct, souvent de manière implicite ou naturelle. Combien de dirigeants familiaux en effet ont choisi de jouer un rôle structurant, dans leur environnement social en particulier ? Combien d’Adrien Allard, fondateur d’Allard Emballages à Brive-la-Gaillarde, co-fondateur de ce qui préfigura la caisse d’allocations familiales de Corrèze, dès 1932 ?

Passé le temps du fondateur, cette RSE « naturelle » (voire « paternaliste »¹) des entreprises familiales perdure le plus souvent et devient un facteur fédérateur des parties prenantes de l’entreprise : salariés, partenaires, pouvoirs publics, clients… et actionnaires familiaux. On s’engage collectivement (et plus ou moins sciemment…) autour de la raison d’être, du sens donné au projet de l’entreprise. Cet engagement devient de plus en plus élaboré, vu comme une composante même du projet.

Les débats ouverts autour de la loi PACTE et du rapport Notat – Sénard ont permis de largement diffuser l’idée selon laquelle une entreprise qui n’œuvrerait pas, au-delà de son objet économique, au « bien commun », mettrait en jeu sa performance de long terme et sa pérennité. Les entreprises recherchent la performance économique, mais dans la vision plus globale d’un projet à impacts positifs et en tous cas dans le respect de l’environnement social et naturel au sein duquel elle est produite.

Ces questions sur le sens donné à l’action de l’entreprise, que l’on peut raisonnablement lier à sa pérennité même, font monter la responsabilité « d’un cran » : ce sont désormais les actionnaires qui s’en saisissent.

En plus de la RSE, la RSA : Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire

Certains actionnaires professionnels « classiques » utilisent d’ores et déjà leur pouvoir d’actionnaire(s) pour engager les entreprises qu’ils détiennent à assumer leur responsabilité sociétale. Au-delà des fonds d’investissement à impact (en France : Citizen Capital ou Alter Equity par exemple), citons les actions du patron du fonds américain BlackRock, Larry Fink, qui a signé récemment une tribune sur ce thème ², ou l’engagement précis et codifié d’Eurazeo ³.

Chez les actionnaires familiaux, la prise de conscience de ce rôle, de ce pouvoir de l’actionnaire sur les enjeux sociétaux portés par son entreprise, se fait aussi de plus en plus forte, grâce à la reconnaissance assez récente de la légitimité de la prise de parole par l’actionnaire face aux managers familiaux, comme non familiaux. Aujourd’hui la RSA (Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire) complète, voire, guide la RSE, qui se joue au niveau de l’entreprise elle-même.

Le principe de la Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire

Nombreux sont désormais les exemples dans lesquels l’Actionnaire familial met en avant sa part de responsabilité sociétale et se met en situation d’exprimer « ce à quoi il tient » en termes d’éthique, de respect de son environnement social et naturel, de mise en œuvre d’un modèle de développement économique vertueux emportant l’ensemble des parties prenantes concernées… Il détaille les points sur lesquels il ne transigera pas avec le management de son(ses) entreprise(s). Il fixe ainsi le sens dans lequel s’inscrit le développement de l’entreprise, et pose les bases de la politique RSE qu’elle pourra mener, voire d’une transformation graduelle plus profonde engageant son business model même, le tout en harmonie (sans redondance) avec les convictions fortes exprimées en matière de RSA .

Shéma fonctionnement de la responsabilité sociétale de l'actionnaire et de la RSE

Les modalités de la Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire

De nombreuses familles actionnaires ont choisi, historiquement, d’exprimer cette RSA, contribuant largement au bien commun, par l’action de leur fondation (les exemples sont nombreux, comme la Fondation Bettencourt Schueller , une des plus largement dotée en France). Ce qui nous semble assez nouveau dans le moment présent, c’est le souci de cohérence de l’ensemble entre RSA et RSE, dans une quête de sens global à donner à l’aventure économique portée par (ou avec) les actionnaires entrant dans cette nouvelle dynamique, qu’elle se traduise ensuite par des axes de gouvernance de(s) l’entreprise(s), des actions philanthropiques ou des pratiques d’investissement (ou même un peu tout ensemble, à la manière d’un RAISE Capital  qui associe de manière imbriquée des activités de capital investissement, d’investissement immobilier et des actions philanthropiques).

Les enjeux de la Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire

Cette question du sens devient centrale pour les entreprises qui se transmettent de génération en génération et qui doivent se réinventer à chaque transmission pour engager un nombre croissant d’actionnaires, de plus en plus divers dans leur profil. Les nouvelles générations notamment, arrivant aujourd’hui dans l’antichambre des responsabilités, sont très sensibles à ces questions de responsabilités sociétales, et sont finalement aussi impatientes de voir ces sujets traités comme des priorités (et non comme des contraintes) , que potentiellement contributrices pour y travailler.

La RSA pose donc des axes de réflexion sur la pérennité de l’entreprise et cette prise de conscience devient incontestablement une attente des actionnaires. Elle est ainsi un levier d’engagement à disposition de ceux qui pilotent la dynamique des actionnaires pour créer un véritable socle actionnarial au service d’un projet stratégique redéfini collectivement.

La Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire :

  • Est un facteur d’identité collective (savoir qui nous sommes au-delà des métiers que nous pratiquons)
  • Donne l’occasion de se projeter dans l’avenir, d’ouvrir de nouvelles voies
  • Offre des opportunités pour entreprendre autrement, sur de nouveaux marchés
  • Contribue à l’anticipation des risques (prévenir/réagir en cas de crise)
  • Permet de « moderniser » l’image d’un groupe, de développer son attractivité, voire de le déployer vers de nouvelles activités,
  • Accompagne, voire « inspire » la visibilité des actions RSE déjà mise en place au sein du groupe
  • Assure donc l’harmonie de l’attelage « actionnaire/Entreprise »

Passée la génération des fondateurs, pour laquelle la Responsabilité Sociétale a été vécue comme un engagement aussi implicite que naturel, les actionnaires d’entreprises familiales se sentent aujourd’hui de plus en plus responsables de l’impact social et environnemental du modèle économique des activités qu’ils soutiennent. Quand on est actionnaire d’une société familiale (voire d’une société éponyme !), la Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire devient un simple sujet de bon sens : l’action de la société engage la famille, son nom, et touche toutes les parties prenantes associées : quelle trace l’actionnaire souhaite-t-il laisser au-delà ou au soutien d’une réussite économique, pour quoi souhaite-t-il être reconnu ?

C’est la cohérence des engagements entre Responsabilité Sociétale de l’Actionnaire et RSE des entreprises détenues qui donnera la puissance au sens, qui sera le vent porteur du développement des entreprises. La RSA devient la constante de l’actionnaire au-delà de leurs différences et des métiers qu’il porte, le levier de fédération des actionnaires au-delà du « simple » projet économique… de là, la RSA : nouvelle pierre angulaire de l’actionnariat familial ?

Références / Pour aller plus loin :

  • [1]Lire l’article de Michel Capron « La Responsabilité Sociale d’Entreprise », dans l’Encyclopédie du développement durable, Editions des Récollets – Juillet 2009
  • [2]https://www.blackrock.com/corporate/investor-relations/larry-fink-ceo-letter
  • [3]https://www.eurazeo.com/fr/responsabilite/strategie-rse-et-objectifs-2020/strategie-et-objectifs-2020/
  • [4]Exemple de la holding Fédéractive : son document « projet actionnarial » exprime sa vision de l’entreprise, citant entre autres considérations la génération de richesse pour l’ensemble des parties prenantes, l’intérêt général, le bien commun… : voir point 2 du « projet actionnarial » en suivant le lien : http://www.federactive.com/assets/files/images/actualités/20180426%20Projet%20actionnarial.pdf
  • [5]Lien vers la fondation Bettencourt – Schueller : https://www.fondationbs.org
  • [6] visiter le site www.raise.co

N’hésitez pas à nous contacter pour échanger et réagir sur ces sujets via le formulaire de contact : contactez notre cabinet .

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Trois bureaux familiaux modernes

Le bilan d’étape

  • C’est notre « rapport de fin de mission », qui évalue (et valorise…) la résolution des problèmes posés, tels que décrits par le diagnostic (qui du coup est mis à jour) …
  • … tout en ouvrant aussi sur les nouveaux enjeux qui restent à aborder ou sur les nouvelles problématiques qui découlent du travail effectué…
  • … afin de garder en mouvement le collectif suite à la démarche.
  • C’est donc bien un « bilan d’étape », dans un processus en mouvement, car ce qui compte c’est la dynamique dans laquelle est placée la famille, pas le fait que Family & Co ait achevé une phase de sa mission !

La synthèse Family & Co

  • Tenant compte à la fois des enjeux identifiés, du contexte d’action et des ressources et contraintes, ce document synthétise les envies des actionnaires, leurs axes de réflexion et dessine les schémas d’organisation utiles pour résoudre ou anticiper d’éventuels problèmes.
  • Il intègre un plan d’action pour permettre à la famille d’approfondir ou concevoir les éléments de projet ou d’organisation qui sont adaptés dans sa situation.

Les entretiens Family & Co

  • Cette analyse complète vise à examiner la situation réelle de l’actionnariat en profondeur, à partir d’un croisement d’entretiens individuels complets et structurés et de moments collectifs
  • Issue d’une expérience de plus de 15 ans auprès des familles, cette grille d’analyse individuelle couvre de façon globale l’ensemble des aspects de la relation entre famille et entreprises, lorsque nombre d’intervenants sur notre marché, issus d’une expertise en particulier, adoptent des prismes techniques plus marqués et se concentrent sur telle ou telle dimension de cette relation.

La matrice des enjeux

  • A partir du diagnostic partagé, les principaux enjeux sont identifiés et discutés
  • Ils sont ensuite hiérarchisés dans la matrice des enjeux de Family & Co (en savoir plus ici)
    La « Matrice des enjeux » classe ces derniers, quelle que soit leur nature, en fonction de la maîtrise qu’en ont les responsables et de l’impact que leur « non résolution » peut avoir sur la vie de la société… ou de la famille.

Le diagnostic initial

  • Le point de départ est le diagnostic effectué par le responsable, seul ou avec F&Co.
  • Celui-ci est ensuite partagé avec le Partner Family & Co, avec lequel il donne lieu à une lecture critique.
  • Le diagnostic est finalement co-construit, c’est-à-dire fait l’objet d’un consensus entre les deux.