De grands questionnements s’ouvrent actuellement globalement et pour les entreprises familiales : leur socle actionnarial et la vision des actionnaires familiaux ne seront pas étrangers à ces questionnements. Cette période de crise se prête à un peu de grandiloquence mais aussi beaucoup de réalisme pour les entreprises familiales.
Comme nous l’avons évoqué dans nos publications précédentes (« Quel projet pour le « jour d’après » ? » et « Solidarité et action contre virus, sidération et repli sur soi ») : il est primordial que les actionnaires des entreprises familiales deviennent des “acteurs du monde d’après” cette crise. La recherche de cette place à trouver commence aujourd’hui. Au moment où les écosystèmes se transforment, au moment où se révèle une puissante solidarité intergénérationnelle, l’actionnariat doit prendre son destin en main.
Quels sont les défis lancés à cette communauté actionnariale ?
Un socle actionnarial et familial challengé par la crise pour les entreprises familiales
L’actionnariat familial peut avec ses actionnaires investis dans l’opérationnel et ses actionnaires plus éloignés voir son socle vaciller pendant la crise. D’une manière caricaturale, il sera ainsi scindé en 2. D’une part, une mobilisation quotidienne très intense afin de s’investir dans la gestion de crise. De l’autre, un actionnariat ébranlé dans ses certitudes et la peur de la remise en cause d’un lendemain où l’entreprise (revenus et patrimoine) pouvait permettre une sécurité financière.
De là, une angoisse peut faire son apparition chez certains actionnaires : l’entreprise et les opérationnels font-ils bien les choses ? Quels sont les risques économiques réels pour l’entreprise ? Quelle est la perte potentielle pour l’entreprise ? Quels sont les risques pour le patrimoine familial et le patrimoine individuel de chacun, pour le dividende ?
Cette crise pourra alors évoluer en une crise de confiance ou de challenge envers les entreprises familiales. Il apparaît clair pour nous que les entreprises familiales qui ont su travailler sur l’organisation de leur actionnariat auront un avantage fort vis à vis des autres entreprises. Ces entreprises seront peut-être plus à même d’agir en accord avec une vision partagée, en accord avec les principes, valeurs et objectifs de l’actionnaire, et donc une compréhension et un soutien de ces actions partagés au sein de l’actionnariat. Pour ces entreprises cette harmonie préservée dépendra directement de la cohérence des actions avec la vision posée et de la « bonne » communication entre l’entreprise et les actionnaires.
Les autres entreprises qui n’ont pas fait ce travail devront faire en sorte que la tectonique des plaques familiales soit douce.
Cette épreuve permet enfin de faire l’état des forces et des faiblesses :
- forces / faiblesses de l’organisation
- forces / faiblesses du collectif
- forces / faiblesses de chaque individu au sein du collectif et pour lui-même
En même temps qu’elle questionne le collectif et les individualités au sein de l’actionnariat, la crise révèle une très forte solidarité entre les générations : quels impacts dans la dynamique familiale ?
A l’issue de cette période de solidarité inter-générationnelle spectaculaire, quelle harmonie sociale générale de long terme ?
Un deuxième élément fort de cette crise est la sollicitation de l’harmonie intergénérationnelle. Bien que ce virus touche l’ensemble de la population, c’est bien pour protéger les générations dites “à risque” que l’arrêt de l’activité a été décrété (sans oublier bien sûr la protection de notre système de santé…). Cette fracture entre les générations pourrait s’accentuer davantage lors de la sortie du confinement.
Dit clairement : les générations “à risque” aujourd’hui sont (bien souvent) les générations “aux commandes” dans les entreprises familiales et plutôt plus « à l’abri » d’un point de vue financier que les plus jeunes générations, en particulier dans les actionnariats familiaux. Et les générations dont l’activité est « gelée » et l’avenir d’autant plus incertain sont les jeunes générations.
La période vient souligner d’une part l’inéluctabilité de la transmission et l’importance de la réflexion sur la transmission au sein des actionnaires. Cette réflexion sera forcément nourrie de ce que chacun apporte aujourd’hui, qui souligne l’importance du partage et de l’échange entre les générations :
- L’éclairage des anciennes générations sur les moments difficiles du passé (crises financières, guerres etc.)
- L’espoir et l’envie de s’engager dans la transformation de la société pour les nouvelles générations (et sa digitalisation ?)
Nous pensons qu’il en va également de la cohésion sociale générale, au sein de l’entreprise familiale, comme au sein de la société.
Travailler et nourrir la cohésion de l’actionnariat
Cette période qui s’ouvre engage à approfondir ou parfois démontrer le projet collectif. Nous pouvons la voir comme l’épreuve de vérité (ultime ?) du projet collectif. C’est la leçon de sens, d’action et d’optimisme portée par les entreprises familiales qui œuvrent dans cette crise du coronavirus.
Au sein de la communauté des actionnaires, c’est aussi un rappel de l’importance du travail sur la cohésion de groupe « quand tout va bien » pour être en situation d’affronter l’imprévu dans les meilleures conditions. Enfin, c’est un coup de projecteur sur le besoin d’associer l’ensemble des générations aux réflexions portant sur un projet commun.